La Commission nationale de l'Informatique et des Libertés,
Vu la directive 95/46 /CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
Vu la convention no 108 du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé de données à caractère personnel ;
Vu la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
Vu le décret no 78-774 du 17 juillet 1978 modifié pris pour l'application de la loi du 6 janvier 1978 susvisée ;
Vu la délibération no 97-005 du 21 janvier 1997, modifiée par la délibération no 2001-062 du 20 décembre 2001, concernant les traitements automatisés d'informations nominatives relatifs à la gestion du patrimoine immobilier à caractère social ;
Après avoir entendu M. Guy Rosier, commissaire, en son rapport, et Mme Charlotte-Marie Pitrat, commissaire du Gouvernement, en ses observations,
Formule les observations suivantes :
Par délibération du 26 mai 1981, la commission a souhaité faciliter les formalités déclaratives des organismes de gestion du patrimoine immobilier à caractère social en adoptant une norme simplifiée de déclaration applicable aux traitements de gestion de ces organismes.
Par délibération du 16 octobre 1984, la commission a autorisé que soit collectée, dans le cadre de cette procédure simplifiée de déclaration, l'information relative à la nationalité des personnes concernées afin de mettre en oeuvre les mécanismes de subventions destinés alors à inciter à la construction de logements réservés aux personnes immigrées et à permettre aux organismes concernés de veiller à ce que l'attribution des logements sociaux puisse assurer une « mixité sociale », reflet de la conception républicaine de la vie sociale.
Par délibération du 21 janvier 1997, la commission, saisie par les organismes concernés, a admis que l'information relative à la nationalité des intéressés puisse être communiquée, dans le cadre de cette procédure simplifiée de déclaration, aux instances participant à l'attribution des logements sociaux.
Saisie de plaintes pouvant laisser supposer que la collecte d'une telle information était susceptible de susciter certains préjugés défavorables, sinon des discriminations, la commission a procédé à plusieurs vérifications sur place auprès d'organismes de gestion du patrimoine immobilier à caractère social répartis sur tout le territoire, en application de l'article 21 de la loi du 6 janvier 1978.
Aucun élément de fait n'atteste, en l'état, que les fichiers manuels ou informatisés mis en oeuvre dans le cadre du logement social, et dont le fonctionnement a été vérifié par la commission, soient susceptibles de générer ou de faciliter des discriminations.
Les enseignements de ces missions paraissent toutefois devoir conduire à rappeler certaines recommandations destinées aux responsables des traitements d'informations nominatives concernés :
1. Aucune information faisant apparaître directement ou indirectement les origines raciales, au sens de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978, des personnes concernées ne saurait être collectée auprès des demandeurs de logement. Par ailleurs, aucune information relative aux « origines » du demandeur ou au pays de naissance de ses parents n'est pertinente au regard de la finalité de tels traitements.
2. L'information relative à la nationalité des demandeurs de logement est un élément d'état civil qui peut être régulièrement collecté et enregistré dans un traitement automatisé de gestion locative sociale et porté à la connaissance des instances participant à la procédure d'attribution.
3. Le lieu de naissance est, au même titre que la date de naissance, un élément d'état civil. La finalité des traitements de gestion des demandes de logements sociaux ne saurait justifier qu'un tri puisse être opéré sur le critère du lieu de naissance des intéressés, ni que l'information relative au lieu de naissance soit enregistrée de manière spécifique, c'est-à-dire ailleurs que dans les champs d'informations consacrés aux éléments d'état civil.
4. La date d'arrivée en France ne constitue pas, aux termes de la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions et des plans départementaux d'action sociale, un critère devant être pris en compte pour apprécier l'ordre de priorité de l'examen de la demande. Si cette information est susceptible de déterminer des mesures particulières d'accompagnement social au bénéfice des personnes concernées, sa collecte systématique ne devrait pas aboutir à ce que les étrangers séjournant depuis peu de temps sur le territoire français soient systématiquement tenus pour non prioritaires par chacun des organismes auxquels ils s'adressent. En tout état de cause, la norme simplifiée no 20 ne prévoit pas la collecte de l'information relative à la date d'arrivée en France dans le cadre de cette procédure simplifiée de déclaration.
5. Une fois le locataire dans les lieux, il apparaît sans utilité au regard de la finalité des traitements de gestion mis en oeuvre de procéder à des interrogations fréquentes sur la nationalité des intéressés. En tout état de cause, les textes législatifs et réglementaires régissant les enquêtes d'occupation des logements sociaux et les enquêtes de supplément de loyer solidarité ne mentionnent pas la nationalité parmi les informations pouvant être collectées. Aussi la collecte de cette information, à l'occasion de ces enquêtes, auprès du titulaire du bail ou des personnes vivant dans les lieux, doit-elle être considérée comme excessive et dépourvue de pertinence au regard de la loi du 6 janvier 1978.
6. Toute information enregistrée dans les zones en texte libre, dites « blocs-notes », des traitements automatisés de gestion du patrimoine doivent être pertinentes, adéquates et non excessives au regard de la finalité du traitement. Ces informations qui doivent être objectives et ne résulter d'aucun jugement de valeur porté sur les intéressés doivent leur être communiquées, au même titre que toute information les concernant, à l'occasion de l'exercice de leur droit d'accès.
7. Les candidats à la location d'un logement social et les locataires doivent être informés, de manière claire et intelligible, du caractère obligatoire ou facultatif des réponses, des conséquences à leur égard d'un défaut de réponse, des destinataires des informations et du lieu où s'exerce leur droit d'accès et de rectification aux informations les concernant.